Nouvelle journée sous le ciel de Sydney.
Nouvelles découvertes.

Je me motive donc à visiter le quartier chinois. Coincé entre Central et Darling Harbour, au sud du CBD.

Il possède ses banques, ainsi que son propre mall de 4 étages. Dixon St signe le début de chinatown, avec sa porte caractéristique des little china. Un clown se fatigue sous l’arche à faire du hula hoop pour gagner quelques pièces, sans grand succès.

Il faut dire que nous somme en semaine, et que donc les environs sont assez déserts. C’est autant gênant pour lui que pour moi, car niveau photo ou vidéo, ca rend tout de suite beaucoup moins bien. Mon appareil ne va donc pas chauffer beaucoup.

Pourtant la petite rue a son charme, avec ses cafés, restaurants et boutiques de bric-à-brac typique des chinatown. Mais bon, il faudra y repasser un week end pour espérer un peu plus d’animation.

Idem un peu plus loin. Je me perd un peu vers l’est, et tombe sur un centre commercial cette fois ci beaucoup plus typé japonais. Un étage est consacré à la restauration typique du pays au soleil levant. A l’étage, un immense espace de jeux d’arcade, tous plus kawaii et wtf les uns que les autres. Ainsi que ses photomatons improbables. Mais comme pour chinatown, le jour et l’heure ne sont pas propices, et l’espace est vide. Ambiance un peu étrange de se retrouver seul dans cette sale de jeu avec tous ces écrans qui flash, et ces musiques et bruitages qui ne trouvent personne pour courtiser. Un peu comme un morning wood : c’est bien jolie mais cela ne sert à rien. Dans tous les cas je me croirais vraiment à Tokyo, et je n’ose imaginer le brouhaha de cet endroit à l’heure de la sortie des cours/bureaux.

Avant de rentrer à Banksia, je passe par Town Hall pour faire quelques courses au Woolworths du coin. Je ne peux m’empêcher de m’arrêter devant, justement, l’hôtel de ville. Encore de la vieille pierre comme on aime ! Tout comme la St Andrew’s Cathedral, qui est adossée à Town Hall. Cette belle pierre au style architectural très raffiné, se trouve en plus magnifié par la végétation ambiante. Et plus particulièrement par les Jacarandas, ces arbres typiques australien, qui sont actuellement en pleine floraison, et nous gratifient ainsi de fleurs violette des plus tape à l’oeil.

De retour à la maisonnée, je me prépare de classique pâtes bolonaise, et arrive à attirer l’attention de Valentina. Par soucis de commodité, j’ai pris l’habitude de briser en deux mes spaghettis avant de les plonger dans l’eau bouillante. Elle me fait alors remarquer que elle, n’en fera pas un scandale, mais que si jamais j’effectue ce même geste en Italie en présence d’anciens, j’entendrais parler du pays !

En fin de journée, le petit couple d’allemand fait surface. Le mec, avec sa tenu jaune fluo en guise de bleu de travail, vient de finir une journée de taf. Pour financer leur voyage, ce dernier fait de l’intérim dans la construction dans chaque ville qu’ils croisent. Leur truc étant plutôt l’appel de la campagne et des zones reculées, ils mettent les pieds dans une ville vraiment juste pour repasser leur compte dans le positif.

La construction et le bâtiment sont clairement des secteurs très porteurs en Australie. Les offres d’emplois pullulent. Les chantiers également. Il suffit de se balader en ville pour s’en rendre compte. Non pas que vous croisez des constructions à tous les pâtés de maison, non, mais par contre le nombre d’ouvriers que vous croisez est assez impressionnant. Réellement. Dans la rue, dans les trains, toujours à se déplacer. Tous avec leur veste fluo réglementaire.

Pendant ce temps, madame s’occupe de l’administratif, et en particulier de l’immatriculation de leur dernier van. Ce qui en Australie n’est pas de la tarte, car chaque Etat possède ses propres règles, c’est donc à vous de vous renseigner et d’enregistrer votre bolide où c’est le plus avantageux pour vous.

Entre ce couple et Valentina, un monde les sépare. Ou plutôt 2 styles de voyage. Et ils résument parfaitement mon dilemme, déjà présent au Canada.

Travailler dans mon domaine quelques temps, au risque d’y prendre goût et de ne plus pouvoir/vouloir voyager par la suite ? Ou placer le curseur sur le voyage, le roadtrip, et juste se servir du travail comme d’un outil, et donc se limiter à des petits boulots ?

Ma raison se porte sur le choix de Valentina, mes tripes sur l’autre.

Quoiqu’il en soit, je rencontre enfin K en fin de soirée. Elle passe pour s’assurer que tout se passe bien avec les allemands, et pour pouvoir récupérer son enveloppe en sous main. Une broutille ne fonctionnait pas dans la cuisine, et elle était ainsi aussi venue pour régler cela.

Une fois fait, ce petit bout de femme, la trentaine et d’origine chinoise, nous offre à moi et à Valentina, présente également dans la cuisine, une bouteille contenant un cocktail à base de vodka. Une boisson pour fille car les arômes des différentes bouteilles sont très orientés pêche melba mango.

Nous voici donc nous 3 à s’envoyer notre petit verre aux frais de la proprio, tout en racontant un peu nos vies. Random, quand tu nous tiens. Je l’épaterais avec ma facilité à trouver les ustensiles dont elle avez besoin, mais surtout devant mon habileté à changer le sac plastique de la grande poubelle présente au centre de la cuisine. Et oui madame, je connais tous les tricks, comme de devoir donner un coup violent et ferme au sac avant de le mettre en place. J’ai toujours su que mes mois à Tim Hortons me seraient utiles un jour. Tant et si bien qu’après cela elle ne finira pas de me couvrir de louanges.

Une fois partie, Valentina en profite pour nourrir les 3 chats qui viennent trainer dans le jardin. C’est notre petit secret et un rituel. C’est aussi ce soir là où j’ai découvert qu’un animal pouvait faire autant de bruit qu’une autoroute…

Sans déconner.
De retour dans la cuisine, j’entend un bruit des plus lourd et continu. Je n’arrivais pas à reconnaitre ce son, mais pour moi il était sûr que cela venait d’une activité humaine, d’une machine. Mais pas du tout. Ma conscrite m’indique que cela vient d’un animal. Une sorte de grosse cigale locale. Je n’en croirais pas un mot avant de voir la bête en action.

L’inconcevable est donc bien réel. Comment une si petite chose, animale, peut faire autant de bruit. Et encore ce soir là nous n’avons pas à nous plaindre, il n’y en a qu’une. Lorsqu’elles sont plusieurs c’est un véritable carnage sonore.

Mis a part ces bestioles, cette petite maison du bonheur me plait réellement, le melting pot est parfait, et j’aimerais carrément booker une semaine complète pour pouvoir rester dans cette atmosphère positive.

Mais je ne souhaite pas avancer autant d’argent. Et de toute façon, j’ai reçu une réponse positive pour du HelpX. Un hôte est prêt à m’accueillir dans son appartement à Blaxland, ville qui se trouve au seuil du Blue Mountains National Park. Il m’attend dans 2 jours. Cela devrait me faire un bon pied à terre pour partir explorer le parc et me donner un peu d’air, je suis donc assez content. Même si la perspective de quitter mes roommates improvisés est une peine sans nom. J’arrive tout de même à négocier avec K pour rester une nuitée supplémentaire. Lui indiquant clairement que je pourrais passer ma dernière nuit ailleurs, mais que l’ambiance est si bonne ici que je préférais rester.

Le jour suivant, Sydney pleur mon départ, en nous gratifiant d’une bonne saucé.

J’étais parti me rendre dans la banlieue de Sydney pour trouver un magasin Kmart, où l’on trouve de tout à 3 fois rien, dans l’idée de m’acheter des nouvelles tennis car les miennes ont rendu l’âme depuis bien trop longtemps. Sauf que sorti de la station de train, arrivé à mi chemin, le ciel me tombe sur la tête. Je me trouve un abri de fortune, et reste bloqué là comme un con. Pas de parapluie sur moi. Et la pluie est vraiment trop dense pour effectuer mes 5 minutes restantes de marche pour atteindre le Kmart. Surtout que ne connaissant pas l’endroit il est fort probable que je me plante 2 ou 3 fois de direction en chemin…

After a while, je rebrousse chemin, fonce en mode ninja à la station de train, traversant même le dernier passage piéton au rouge comme un sale anarchiste, obligeant ainsi une voiture à revoir sa véhémence de vouloir démarrer. Je n’ai pas eu de coup de klaxon, le conducteur a dû avoir pitié.

Après un rapide séchage à la maison, je me retrouve en quelque sorte bloqué avec Valentina, pleuvant comme vache qui pisse au dehors. Portant ses lunettes de vue noir épaisse, synonyme de session internet pour elle, je lui propose une pause avec une partie d’échec. Nous aurons juste perdu une minute de notre vie dans un moment Lost in Translation, elle ne connaissant pas le mot anglais chess.

Bon j’aurais au moins appris l’équivalent italien, à savoir scacchi. Durant que moi je lui apprend les bases de ce jeu stratégique dont je raffole.

Ensuite j’aurais droit à un de ces moments où la communication devient magique. Où elle suit son propre chemin. Ici cela se traduit qu’en quelques échanges, nous arrivons à parler de Limoncello, pour arriver au final à évoquer le Commissaire Maigret. Les intermédiaires étant Calvados et Grog.

Torrent de pluie ou non, je dois tout de même ressortir pour atteindre un magasin photo qui borde Chinatown. Nouveau et dernier craquage financier, en m’offrant en effet une Gopro Hero4 Silver. Là encore avec le taux de change je gagne énormément. Et je tenais absolument à m’en procurer une avant mon départ pour les Blue Mountains, espérant y trouver des beaux panoramas pour l’utiliser.

Le soir venu, je revérifie le prix du billet de train Sydney Central/Blaxland, et il est toujours au prix dérisoire de 5,81$. C’est un pousse au crime.

Je profite de cette dernière soirée, et le lendemain, de ma dernière matinée dans la maisonnée, pour faire le tour des habitants temporaires et noircir ainsi mon carnet d’adresse, histoire de rester un peu en contact.

Je ne suis pas le seul à être tombé en amour du lieu. Je croise mon bon Guillaume sur l’heure du midi dans le jardin, entrain d’installer une tente pour y passer la nuit. Il a booké hier sa chambre pour une semaine, pour prolonger ses 3 premiers jours, mais pour cette nuit toutes les chambres sont réservées. La très arrangeante K les a donc autorisé à passer la nuit sur la pelouse.

Poignées de main et hugs, il est temps de lever le camp pour moi. Le pincement au coeur est réel, en particulier le fait de quitter Valentina, dont je sais par Guillaume que l’attachement est réciproque. Dur rappel pour moi, qui est un des principaux point noir en voyage, à savoir les amitiés éphémères. Aussi belles qu’un papillon, mais avec une durée de vie identique.

Je ne savais pas encore alors que je n’allais pas la revoir. Même si déjà, au fond de moi même, je pressentais déjà que l’appel du baroudage prenait le dessus, et qu’ainsi son envie de vie sédentaire nous éloignerais inexorablement.

Le fait de devoir prendre mon premier train régional m’occupe cependant assez l’esprit pour ne pas que je cogite de trop sur le moment. C’est qu’il tacherais de ne pas se planter !

Sur le site des transports de Sydney, il est précisé que pour Blaxland, la gare étant petite, il faut s’arranger pour monter dans un des 4 derniers wagons du train. Sous peine de ne pas pouvoir y descendre.

La blague étant qu’une fois arrivé sur la bonne voie, une fois vérifié auprès d’un agent que le train en gare est bien celui que je dois prendre, je m’aperçois qu’il n’a de toute façon que 4 wagons… Cela devrait couper court à tout stress, mais l’ironie est qu’en fait…non. L’overthinking prend place : « putain pourquoi il n’y a que 4 wagons, c’est débile ! J’ai dû me tromper de voie. De train. Peut être que les rames sont comptés doubles au final ». Ou peut être que tu penses trop ! Bon en même temps il est vrai que l’on est jamais à l’abri d’une surprise. Et si je voulais un toit pour ce soir j’avais intérêt à ne pas me rater.

Pas de doute, je vais bien quitter l’agglomération de Sydney. Fini le jaune western dans l’habitacle, bonjour le violet qui tache. Les sièges font aussi plus confortables, plus TER, même s’ils gardent leur option rétractable made in oz.

Le ciel est assez couvert en ce début d’après midi. Ce n’est donc pas la météo qui aidera à augmenter le charme de la banlieue ouest de Sydney. Tout y est assez gris, triste. Parfois laissé à l’abandon. Toujours avec un arrière goût de quelconque.

Il faut attendre de quitter complètement l’agglomération de Sydney pour que les choses s’arrangent. En s’approchant de la campagne des Blue Mountains, les forêts se font plus denses, le rail suit un chemin plus sinueux, tout en gagnant doucement un peu d’altitude. Bon rien de transcendant, Blaxland ne se situant qu’à 234 mètres au dessus de la mer.

Une fois passé Penrith, la magie commence à opérer. Ambiance le train de la mine de chez Disney, sauf que là ce n’est pas du carton-pâte. Le train emprunte ainsi des chemins improbables, parcourant un tracé qui a été taillé à la pioche dans la roche ocre. C’est assez impressionnant, mais surtout très dépaysant.

Le chemin que poursuit mon train est aussi tortueux que l’histoire de la colonisation européenne des Blue Mountains. Longtemps inaccessibles, il aura fallu attendre 1813 pour que 3 gus se mettent en tête d’explorer la région pour trouver une voie vers l’ouest, et réussissent à trouver une route accessible à travers le bush et les montagnes. Ces 3 gus ? Blaxland, Wentworth et Lawson. Leurs noms servant ainsi pour 3 villes locales, leur histoire est aisément transmise.

Ce paysage pittoresque qui se donne à voir à travers les vitres de mon wagon a un désavantage, c’est que la NSA, euh, mon Iphone, n’arrive plus à me localiser. Il est resté sur Penrith… Génial, moi qui lui donnait entièrement ma confiance, maintenant il va falloir trouver mon chemin sur place à l’ancienne. N’ayant gribouillé qu’un très très succinct plan, on risque de s’amuser.

L’inconvénient également, c’est que je ne peux pas suivre les arrêts du train. Ne connaissant pas encore les bleds locaux, les annonces aux hauts parleurs me parviennent comme du chinois, et je ne suis même pas sûr de comprendre Blaxland s’ils citent ce nom. Mon siège est situé en plus de telle façon que je ne peux pas distinguer les panneaux en gare. Oui, en général, les galères ça ne vient jamais seul.

Une fois arrivé à Blaxland, j’ai juste le temps de m’en rendre compte, de porter mes affaires comme je peux et de foncer vers une sortie. Comme mon hôte Keith me l’a indiqué, j’emprunte la passerelle qui passe au dessus des voies. Deux chemin ensuite s’offrent à moi. En me voyant hésiter, un sympathique papy m’offre son aide, avec une bonté qui n’a d’égal que son sourire. Sauf que je ne sais vraiment pas où je dois me rendre, à part devoir redescendre au niveau du plancher des vaches, someday.

Une fois redescendu, je tombe sur une rue avec quelques magasins. Un banc hospitalier se propose pour me décharger de mes sacs 5 minutes. Une fois plus libre de mes mouvements, je réévalue la situation. Une adresse, un plan sommaire, pas de gps et enfin en checkant mon téléphone, pas de réseau mobile non plus. Impossible de prévenir Keith donc. Et bien mes ptits frères, ça commence bien !

Je me grille une cigarette que je regrette déjà, puis me dirige vers la direction où devrait se situer ma nouvelle demeure. Pour cela, j’emprunte une petite route très inclinée. Heureusement, je n’ai qu’à la descendre. En contrebas, au niveau où le chemin rejoint une route plus importante, j’aperçois une masse sombre, un colosse qui attend visiblement quelqu’un. T-shirt et short noir, barbe blanche de 4 jours fournit, coupe de cheveu à 80% inspiré par Bruce Willis, je tombe sur mon bon Keith, m’accueillant avec un « bonjour » d’usage. Le début d’une longue histoire.