En rentrant de ma marche à travers les rizières d’Ubud, je rejoins le « centre ville » pour aller manger un morceau.

La rue principale, Jl. Raya Ubud, est saturée de restaurants pour touristes.
En cherchant bien, je trouve un petit établissement affichant des prix très raisonnables.
A peine plus chers que le restaurant se trouvant à côté de mon accommodation.

C’est une sorte de grande cafétéria, tenue par des locaux qui font partie de la minorité musulmane de l’île.
Halal en cuisine, et voile pour le personnel sont donc de rigueur.

Mais là encore, je ressent le plaisir de m’imprégner de la culture locale.
En dégustant des plats typiques, à un prix en adéquation avec le niveau de vie. Et avec mon budget de backpacker… Toujours accompagné d’un ice tea aussi sucré que du réglisse.

Ainsi doucement, je commence à prendre mes repères à Bali.
A comprendre le mode de vie et l’organisation urbaine.
A ne plus me sentir sur la lune, mais simplement à l’étranger, dans un pays à la culture très différente de la mienne.

Ubud est l’endroit idéal pour cela.

La ville est à taille humaine, mais suffisamment développée pour y trouver tout ce dont vous avez besoin. Elle dépend pour beaucoup du tourisme aux jours d’aujourd’hui, il n’est donc pas étonnant de croiser tous les matins les gérants passer un coup de propre devant leur établissement.

L’odeur d’encens est présente dans toutes les ruelles de la ville.
Dans l’hindouisme, les offrandes sont importantes, et vous en trouverez partout.

Dans les temples, autels, mais aussi en pleine rue, sur le trottoir.
Le plus souvent sous la forme d’un petit paquet tissé à partir de feuilles de bambous, contenant fleurs, encens en train de se consumer ainsi que de la nourriture, comme du riz par exemple.

Cette dernière denrée attire particulièrement les chats errants, les locaux leurs font donc la chasse dès qu’ils s’approchent !

Les jours s’écoulent donc paisiblement, et par 2 fois, je demanderais à mes hôtes si je pouvais rallonger mon séjour chez eux.
J’y suis si bien !

Je vous laisse jeter un oeil sur le petit déjeuner qu’ils me confectionnent tous les matins !

Ces pâtisseries sucrées à base de riz sont juste un délice.
Et en apprenti pâtissier que je suis, j’apprécie de découvrir des nouvelles choses sur le sujet.

Souhaitant visiter les temples Tirta Empul et Gunung Kawi, situés à l’extérieur d’Ubud, je demande au père de famille s’il ne connaitrait pas quelqu’un qui pourrait m’y emmener. Ce n’est pas les conducteurs de taxi scooter qui manquent dans les rues, mais en passant par lui je n’aurais pas à négocier pour obtenir un prix décent. Et aussi tout simplement car cela me fait plaisir d’aider sa famille/entourage, de faire fonctionner l’économie locale.

Il m’informe qu’il est disponible pour me transporter.
Ok, en voiture Simone !

Avant cela, je vais devoir revêtir des vêtements traditionnels.
En effet, pour les temples que je souhaite visiter, c’est obligatoire. On vous en loue gratuitement sur place, mais vu que la famille où je loge possède déjà ces vêtements, ils me les prêteront pour la journée.

Et c’est un sacré chantier !

Voici donc mon hôte entrain de m’emmitoufler de différents tissus.
La tenue traditionnelle, le sarong, est une sorte de paréo coloré qui se noue à partir de la taille. Il est composé de plusieurs couches de tissus, qui vous couvrent les jambes.

J’aurais aussi droit à un couvre-chef, composé lui aussi de tissus. Le porter est assez désagréable, car pour le faire tenir en place, il est serré autour de votre tête et de votre front autant qu’il est humainement possible de serrer quelque chose…

J’apprendrais plus tard que le couvre-chef n’est pas obligatoire, mais bon, pourquoi faire les choses à moitié, c’est une expérience d’une vie !

Une fois affublé de tout mon attirail, nous nous dirigeons vers la rue pour enfourcher un scooter. Les quelques membres de la famille que nous croisons en chemin se montrent évidemment très enthousiastes au sujet de ma tenue !

Le 2 roues est roi en Asie du Sud-Est, et il me faudra quelques semaines pour m’y habituer.
En effet, la seule fois où j’ai eu l’occasion d’être sur un scooter, c’était il y a une paire d’années, lors d’un stage à Paris, où mon boss m’avait conduit à travers le traffic (fou) parisien pour se rendre à un tournage. C’était des plus effrayant et mémorable.

A l’arrière du scooter, je ne peux m’empêcher de tenir l’épaule de mon hôte.
On a beau ne pas rouler vite (nous dépassons péniblement les 40 km/h), cette sensation d’être dans le vide me déstabilise.

Qui plus est, nous n’avons pas de casque, comme une bonne partie des balinais.
En même temps, impossible d’en enfiler un avec nos couvres-chefs…

A chaque fois que mon hôte prend un peu d’angle sur le scooter, je retiens mon souffle…et me répète en boucle qu’ils apprennent à faire du scooter avant de marcher ici, donc vu son âge, mon chauffeur a toute l’expérience nécessaire.

Rouler dans les terres de Bali, c’est une aventure en soi.
Le traffic routier n’est pas dense, mais la présence quasi exclusive de motos fait qu’à mes yeux, c’est un vrai chaos. A travers des routes d’une qualité respectable, par moments douteuse, à travers des petits chemins au milieu de la dense végétation, les 2 roues se croisent et se recroisent à l’infini.

Entre les vieux modèles lents, les montures plus jeunes qui remontent toute la file, les croisements où la priorité, il faut se la donner, c’est vraiment le far west.

On y croise de plus toute la société.

Les marchants/fermiers qui transportent leurs bêtes ou leur récolte.
Les écoliers/étudiants bien habillés.
Les familles nombreuses, où un des parents est au guidon, suivi de 3 ou 4 bambins collés derrière, à la façon des Dalton.

Après une bonne vingtaine de minutes, nous arrivons à notre première destination, le temple hindou Tirta Empul, qui est structuré autour d’une source d’eau.

Cette dernière est considérée comme sacrée, et est ainsi utilisée par les Balinais pour des rituels de purification.
Fondé en 962 en hommage à la divinité Vishnu, ce site est depuis reconnu comme patrimoine de l’humanité par l’UNESCO.

Il est dur de leur donner tort sur ce point.
En effet, impossible de ne pas être saisi par la spiritualité du lieu.

Deux grands bassins à l’eau claire se trouvent à Jaba Pura (l’entrée du site).
Pour se purifier, les locaux, ainsi que quelques touristes, doivent rentrer dans ces bassins et s’immerger de l’eau qui jaillit de 30 jarres en pierre alignées. Pour compléter le rituel il faut s’immerger sous chacune d’entre elles.

 

Les uns après les autres, les hindouistes patientent pour accéder à un jet d’eau, tout en pratiquant quelques prières.

Pour eux, c’est un acte banale, c’est comme se rendre à l’église.
Avec tout de même plus de décontraction.

On y va en famille, entre amis.
Je croise ainsi des parents avec leur dernier-né.
Lui prend ça pour une grande récréation évidemment !

Dans l’eau fraîche, j’aperçois une majorité de femmes.
En cette fin de matinée, j’imagine que beaucoup d’hommes sont au travail.

Des gens de tous les âges.
Difficile d’ailleurs de ne pas tomber sous le charme délicat des jeunes femmes et de leurs longs cheveux brun si soyeux, aux courbures avantageuses et arborants des sarongs colorés qui les subliment encore un peu plus.

Ces dernières ont plus de restrictions que les hommes pour pratiquer ce rituel. En effet, une des règles inscrite à l’entrée leur interdit d’accéder au bassin si elles ont leurs règles, ou si elles sont enceintes.

Dans les autres sections du site, Jaba Tengah et Jeroan, vous trouverez de nombreux bâtiments et constructions religieuses qui valent le coup d’oeil. Raffinés et colorés, c’est une plongée dans l’hindouisme. Un lieux idéal pour découvrir et s’imprégner de la culture religieuse locale.

En sortant du temple, ayant besoin d’un peu de monnaie, je me dirige vers un distributeur de billets situé sur le parking.
Pas plus grand qu’une cabine téléphonique, mais si j’en parle c’est à cause d’un détail assez improbable : il possède la climatisation !

Au beau milieu de la campagne profonde.
Près d’un édifice religieux.
Dans un minuscule cube.

« Non mais vous-êtes sérieux les mecs ? » me dis-je dans ma tête.

Les jours suivants je remarquerais que la plupart des ATM, à Ubud ou ailleurs, possèdent tous la même caractéristique.
Le client est roi…

En attendant, je retrouve mon hôte, et il me dépose en quelques minutes au second site que je souhaitais voir, Gunung Kawi.
Temple ainsi que complexe funéraire datant du XIe siècle, qui s’étend sur les bords de la rivière Pakerisan.

La particularité du lieu se situe en la présence de 10 statues taillées dans la roche d’une hauteur de 7 mètres chacune.
C’est un peu ambiance île de Pâques, et j’en prend encore une fois pleins les yeux.

Si l’on se rend en Asie, c’est vraiment pour découvrir ce genre de choses.
Pour se plonger dans une culture et une histoire si riche et si éloignée de la notre.

Une fois passé le complexe funéraire, j’arrive plus classiquement au niveau du temple, subdivisé comme d’habitude en différents bâtiments.

J’y trouve des petites mains en plein travail.

En effet, sur les rebords des temples, des femmes s’activent dans la fabrication d’offrandes.
Pour être plus précis, dans la conception du réceptacle à base de bambou ayant pour but de contenir les offrandes.

Studieuses mais tout en lâchant des bonnes blagues de temps en temps au vue des éclats de rires, c’est un plaisir pour moi de découvrir l’envers du décors.

Je ne m’attarderais pas trop avec mon appareil, encore une fois pour ne pas qu’elles se sentent comme des bêtes de foire.

Les alentours de Gunung Kawi sont d’ailleurs des plus photogéniques.
A l’entrée du site, une vue plongeante sur une vallée composée d’une jungle épaisse s’offre à vous.

Au milieu de cet enfer vert, les locaux ont pourtant implanté des rizières, qui s’étendent à perte de vue.
Ce n’était surement pas leur objectif premier, mais le résultat est d’une beauté qui ne peut se savourer pleinement qu’avec vos propres yeux.

Nous rentrons en début d’après-midi sur Ubud, avec, me concernant, des images pleins la tête.

Le soir venu, j’explore ma ruelle pour y dénicher un petit restaurant.
J’en trouverais un au bout de la rue, juste avant de croiser la rue principale.

Ce petit établissement propose uniquement des soupes noodles.
Il faut dire qu’il est tenu par des vietnamiens.
Là encore en famille !

La maman en cuisine, la fille en cuisine et service, et le meilleur pour la fin, le grand père à la caisse.

Ce dernier, assis sur sa chaise au fond du restaurant, dispose sur sa table de la caisse et de toutes les feuilles et stylos nécessaire. Pour payer, il faut venir le voir, et essayer de lui faire comprendre quel plat vous avez consommé. Il sort alors ses lunettes pour lire ses fiches et sa calculette pour annoncer le prix exact.

J’y reviendrais souvent le soir, les prix étant raisonnable, et leurs soupes, à tomber.
Ma présence régulière fera sourire le papy. En particulier lors du fameux moment où il faut payer l’addition, induisant un léger dialogue de sourd entre nous deux !

J’emprunte de nouveau la rue pour rentrer dans ma chambre.
Une rue loin du centre, mal éclairée.

Mais comme dirais Kevin dans un célèbre film sorti en 1990, « vous pouvez venir, maintenant j’ai plus peur du tout ! ».

En déambulant dans la pénombre, seul, je ne suis pas encore aussi relâché que je pourrais l’être en France, mais cela n’a plus rien à voir avec ma peur viscérale lors de mes premiers jours à Bali.

Je commence à avoir mes repères, mes adresses, mes habitudes.
J’apprivoise le terrain, les villes et la culture locale.

Dans cette chaleur toujours tropicale malgré la nuit tombée, je me tiens de nouveau droit et ne rase plus les murs.
La fin de mon calvaire est proche.

Calvaire que je mettrais encore quelques jours avant de trouver son nom.
Choc culturel